26 Mai Lydia Brovelli, membre honoraire du Conseil économique, social et environnemental (CESE)
Le dialogue social va devoir s’emparer de nouveaux sujets.
Qu’est-ce qui vous a amené à orienter votre parcours professionnel vers le champ des relations sociales ?
J’ai été cadre supérieure dans une grande entreprise et syndicaliste. A ce titre, j’ai siégé au Conseil économique social et environnemental. J’ai ensuite été conseillère sociale en Afrique où j’ai représenté le ministère du Travail et de la Santé pour mettre en place des programmes de coopération. Par la suite, je suis retournée travailler pour une entreprise d’assurance. Quel que soit l’endroit où j’ai exercé une activité j’ai toujours eu une démarche d’engagement, une attitude assez « militante ». Elle correspond à ma passion pour la concertation, le débat d’idées, la négociation.
Quel regard portez-vous sur le dialogue social depuis le début de la crise provoquée par la pandémie de covid-19 ? Quelles sont les évolutions souhaitables pour l’avenir et quelles seraient les pratiques à conserver ?
Le dialogue social a dû contribuer à gérer l’articulation entre activité et protection des salariés. Il n’a pas eu lieu de bonne façon partout et les relations se sont parfois tendues. Par ailleurs la réduction des délais de consultation et d’expertise qui a été autorisée est un mauvais signal : elle accrédite l’idée que le dialogue social fait perdre du temps et revient à nier la place des salariés et de leurs représentants dans la prise de décision.
Si la concertation à distance a eu le mérite de synthétiser, de gommer l’aspect « postures » qui existe parfois dans les concertations, les audioconférences ont un peu édulcoré les échanges et ont rendu plus difficile la consultation des salariés. C’est peut-être une forme à conserver dans les phases préparatoires aux négociations mais elle ne remplacera jamais le présentiel.
Par ailleurs le bilan qui sera établi nous dira ce qu’a été le contenu du dialogue pendant le confinement. Je crains qu’il se soit beaucoup focalisé sur l’immédiateté et les conditions sanitaires. La massification brutale du télétravail a eu des conséquences inattendues en termes de surcharge cognitive, d’accroissement des risques psycho-sociaux. La crise a conduit à s’interroger davantage sur le sens du travail, faisant envisager celui-ci plus seulement par son coût mais aussi par sa valeur. Le dialogue social va devoir s’emparer de tous ces sujets, du besoin de protections nouvelles, et pas seulement pour les acteurs des plates-formes et autres précaires. Ces questions ne pourront se contenter de négociations au seul niveau des entreprises -où l’on a voulu cantonner le dialogue social depuis quelques années. La branche et l’interprofessionnel devront reprendre du flambeau.
Vous êtes adhérente de l’association Réalités du dialogue social dont la vocation est de promouvoir le dialogue social. Pourquoi est-ce si important pour vous ?
J’ai toujours considéré que le dialogue social devait jouer un rôle important dans la définition de la stratégie des entreprises. Aujourd’hui une crise sociale, corollaire de la crise économique, se profile et une crise écologique est annoncée depuis longtemps. Pour y faire face il va falloir revoir beaucoup de schémas, renforcer les solidarités, performer toutes les interventions humaines. Cela ne pourra pas se définir sans le dialogue avec toutes les parties prenantes des entreprises -comme des administrations et autres organisations-. En contribuant à promouvoir cette démarche, en faisant connaître les réalisations, Réalités du dialogue social joue un rôle précieux.
Avez-vous vu un film ou lu un livre que vous recommanderiez à la communauté Réalités du dialogue social ?
En cette période où nous sommes privés de spectacles et d’expositions, je vous conseille la visite en ligne proposée par le musée de Giverny, à retrouver en cliquant ici.